Réserve de Gadabédji : +43 % de girafes depuis 2018 et le retour de l’autruche à cou rouge
Dans un entretien accordé au quotidien national Le Sahel, le Commandant Mahamane Hassane, Conservateur de la Réserve de Biosphère de Gadabédji, revient sur les avancées et les défis liés à la réintroduction des espèces emblématiques du Niger.
Jadis disparues de la région à la suite des grandes sécheresses des années 1970 et du braconnage, les girafes d’Afrique de l’Ouest (Giraffa camelopardalis peralta) connaissent aujourd’hui un retour remarquable. Grâce aux opérations de translocation menées en 2018 et 2022, une population viable a été recréée au cœur de la réserve. Enregistrant déjà six naissances, elle affiche une progression de 43 % par rapport au noyau initial.
La dynamique de Gadabédji ne s’arrête pas aux girafes. L’autruche à cou rouge a également été réintroduite et atteint désormais l’âge de reproduction, tandis que d’autres espèces locales reprennent place : gazelle dorcas, chacals, renards, singes patas, ratels ou encore chats de Libye. L’avifaune se distingue par la présence d’aigles, de vautours, d’outardes et d’oiseaux migrateurs. Même les reptiles, tels que le varan du Nil ou le varan des savanes, témoignent d’une biodiversité en pleine renaissance.
Cependant, ces acquis restent fragiles. Trois menaces pèsent sur la réserve : les feux de brousse qui détruisent les habitats malgré les bandes pare-feu, la pression pastorale qui dépasse la capacité de charge du milieu et favorise la dégradation des sols, et enfin les effets du changement climatique, marqués par l’irrégularité des pluies et l’assèchement des mares. Pour sécuriser l’eau de la faune, trois points d’abreuvement solaires ont été aménagés.
Créée en 2013, l’Unité de Gestion de la Réserve fonctionne avec une vingtaine d’agents et six écogardes recrutés localement. Ses missions couvrent le suivi écologique, la surveillance et la mobilisation sociale. Malgré ces efforts, le Conservateur reconnaît que les moyens humains restent insuffisants au regard de la taille du territoire et des défis rencontrés.
Les perspectives demeurent ambitieuses. Les autorités et leurs partenaires envisagent la réintroduction de l’oryx et de la gazelle dama, deux espèces mythiques disparues de la zone. L’écotourisme de proximité apparaît également comme une piste majeure pour concilier protection de la biodiversité et retombées économiques au profit des communautés locales.
Ainsi, Gadabédji s’impose peu à peu comme un symbole de la renaissance écologique au Sahel, où protection, résilience et développement s’articulent autour d’une même vision : assurer l’avenir des espèces emblématiques tout en consolidant la cohésion entre faune et populations.
Boubacar Guédé (Nigerdiaspora)