«Ce genre de journée permet de sensibiliser les gouvernements sur la nécessité de mettre la sécurité alimentaire au centre des préoccupations»
Le Niger vient d’abriter la 4ème édition de la Journée Africaine de la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle. Monsieur le Haut Commissaire à l’Initiative 3N, qu’est-ce qui a motivé le choix du Niger pour accueillir cet important événement?
Il faut rappeler que la Journée Africaine de la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle a été instaurée par la conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union Africaine (UA), en 2010, et elle est célébrée de façon tournante. La première Journée a été célébrée au Malawi, les deux suivantes en Ethiopie, et la 4ème édition au Niger. Pourquoi au Niger ? Parce que depuis deux ans, le Niger a lancé l’initiative 3N, ‘’les Nigériens Nourrissent les Nigériens’’. Cette initiative a fait échos à travers l’Afrique, et même au-delà. Le premier élément, c’est que l’Union Africaine, le NEPAD et les partenaires au développement ont vu qu’il y a un grand engagement politique pour la sécurité alimentaire au Niger, comme cela est illustré par l’engagement personnel du Président de la République, et la priorité que le gouvernement dans son ensemble accorde à la sécurité alimentaire. Un autre élément qui a motivé le choix du Niger pour abriter cet événement est que notre pays a quelque chose à montrer, notamment au sujet de ce qu’on cherche à promouvoir aujourd’hui à travers la communauté internationale, c’est-à-dire le travail intersectoriel, le partenariat. Et c’est tout cela que l’initiative 3 N est en train de faire. Nous essayons de travailler de façon interministérielle, ce qui justifie la création du Haut Commissariat à l’Initiative 3N qui, est dans une certaine mesure, unique au niveau africain. Ce Haut Commissariat l est rattaché à la Présidence de la République, avec des prérogatives de ministère, ce qui fait ressortir tout le caractère stratégique de la question de la sécurité alimentaire. Voilà les éléments qui ont motivé le choix du Niger pour abriter cette 4ème édition de la Journée Africain de la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle.
Que peut-ont espérer des travaux de cette 4ème édition de la Journée Africaine de la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle dans la réalisation effectif du droit des Africains à une alimentation saine ?
Cette journée est d’abord une occasion de rappel. C’est l’occasion de rappeler la problématique de la sécurité alimentaire, de la mettre au top de l’agenda africain, de discuter, d’informer les experts et les gouvernements sur la situation de la sécurité alimentaire. Le thème est ‘’Vers la renaissance de l’Afrique, vers la réalisation du droit à une alimentation adéquate’’. Ce qui montre qu’il est important d’investir dans le cadre de la sécurité alimentaire, de la nutrition, car des études ont montré que le fait d’investir ce domaine permet d’augmenter le PIB de 16 à 20%. Ce genre de journée permet de sensibiliser les gouvernements sur la nécessité de mettre la sécurité alimentaire au centre des préoccupations. En fait cela permet de relancer le débat sur cette importante question.
Résoudre l’équation de l’accès des africains à une alimentation saine revient à résoudre le problème de ressources dont l’Afrique a besoin pour atteindre ce but. Comment vous entrevoyez la solution à cette équation?
Effectivement, la sécurité alimentaire est une question de ressources. Dieu merci, l’Afrique a les ressources, elle a des terres fertiles cultivables, nous avons de grands fleuves, nous avons suffisamment des ressources en eau de surface et en eaux souterraines. Une grande partie du Continent reçoit une pluviométrie moyenne de 1000 mm par an. Si nous avons l’eau, la terre, les hommes, avec 70% de jeunes, donc de bras valides, et les technologies qui sont disponibles aujourd’hui, toutes les conditions sont donc réunies pour que nous puissions atteindre la sécurité alimentaire et nutritionnelle du continent.
C’est vrai, nous n’avons pas autant de ressources financières, mais la première des choses, c’est la volonté politique. A travers l’engagement de Maputo, les pays africains se sont engagés à consacrer 10% de leurs budgets nationaux à la sécurité alimentaire, au secteur agricole; même avec cela, on peut aller loin. Je pense que la question n’est pas un problème de ressources financières, mais une question d’engagement politique de gouvernants. Et ici au Niger, nous sommes en train d’en donner la preuve; bien que nous soyons dans une situation de rareté de ressources, la volonté politique est à un très haut niveau et une bonne partie du peu de ressources que nous est orientée vers la sécurité alimentaire. Nous avons vu comment, avec nos propres ressources, nous avons pu juguler les problèmes de crises alimentaires auxquelles nous avons fait face. Evidemment, on a toujours besoin des appuis des partenaires.
Les travaux de la 4ème édition de la Journée Africaine de la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle ont porté sur le thème, ‘’Vers la renaissance de l’Afrique, vers la réalisation du droit à une alimentation adéquate’’. Quelle contribution le Haut Commissariat à l’initiative 3N a apportée dans les débats sur ce thème ?
Notre institution a joué un rôle important dans les débats qui ont été organisés. D’abord, au niveau du panel de haut niveau que j’ai personnellement présidé, et où nous avons apporté l’expérience du Niger dans le cadre de l’initiative 3N. Et les participants à cette 4ème édition de la Journée Africaine de la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle ont dit au Premier ministre que l’expérience du Niger dans le cadre de l’initiative 3 N est un modèle qui peut inspirer les pays africains.
En termes de retombées, qu’est-ce que la tenue de cette 4ème édition de la Journée Africaine de la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle à Niamey, peut apporter au Niger dans le cadre de la mise en œuvre de l’initiative 3N ?
Cette journée a permis de faire connaitre davantage l’initiative 3 N, ce que le Niger fait dans la sécurité alimentaire et nutritionnelle, au niveau de la communauté africaine et internationale. Et nous avons aussi appris des autres leurs expériences, beaucoup de choses qui peuvent enrichir l’initiative 3 N.
Monsieur le Haut le Commissaire, peut-on dire aujourd’hui que l’initiative 3N a atteint la vitesse de croisière dans sa mise en œuvre ?
Il faut distinguer deux choses: l’initiative 3N est une stratégie de sécurité alimentaire, c’est le long terme. Ce n’est pas sur deux ans, trois ans. Il faut donc distinguer la stratégie du programme 2012-2015 qui fait parti du Plan du Développement Economique et Social. Pour ce qui est de ce programme d’investissement, on peut dire que 2014 est l’année de vitesse de croisière. Il y aura beaucoup plus d’investissements, un engagement plus important des populations avec un travail de communication et de sensibilisation pour qu’elles s’engagent dans la production et la transformation. On peut s’attendre aussi à des appuis plus importants de la part de nos partenaires au développement. Disons que ce sera la mise en œuvre de l’initiative 3 N au niveau des communes, des villages, avec la mise en place des kits polyvalents au bénéfice des ménages. Ces kits sont constitués de banques céréalières, de centrales communales d’approvisionnement en intrants, d’aliments bétail, d’un parc de vaccination, d’un atelier de location et de réparation de matériel agricole, de petites coopératives, d’une institution de micro fiance, d’une radio communautaire, d’un champ école paysans, des moyens pour faciliter l’accès de l’eau aux ménages. Ce sera véritablement l’année du déploiement à la base de l’initiative 3 N. Et tout cela va permettre aux populations d’être résilientes face aux sécheresses, à l’insécurité alimentaire. Et à terme, ‘’sécheresse ne sera plus synonyme de famine’’.
Souley Moutari
1er novembre 2013
Publié le 1er novembre octobre 2013
Source : http://www.lesahel.org/
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