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Au cœur des décharges publiques : La collecte du recyclable se porte bien

L’écrivain malien Amadou Koné disait que : «  le travail même s’il n’arrive pas à sortir l’homme de sa misère, lui garantit au moins sa dignité ». C’est à la recherche de cette dignité que des hommes et des femmes se livrent à la collecte des objets usés dans les décharges pour assurer leur survie. Au cœur d’une ancienne carrière sise au quartier Koubia, devenue aujourd’hui  une décharge, des hommes et des femmes se sont installés et positionnés en attente d’éventuels déchargeurs d’ordures.

Ils ont installés des hangars de fortune au milieu des immondices malgré les contraintes sanitaires, sociales et les aléas climatiques.  En cette soirée du Samedi 18 Septembre 2021, nombreux étaient câblés  autour des décharges. Chacun vaquait à ses occupations se résumant à la collecte, au nettoyage, à la pesée, et à la paie des jeunes ayant livré leurs produits. C’est un travail harassant, mais qui honore son homme. Des bouteilles légères et solides en plastique, en passant par des boîtes de canettes, du fer, des plastiques solides… ici tout se ramasse et se vend à la satisfaction de ceux qui œuvrent dans ce métier. En effet, au niveau de ces décharges, les camionneurs ainsi que les chariots déchargent. Sur place, les collecteurs ruaient sur les décharges qui pour ramasser des bouteilles en plastiques, qui pour collecter des objets en plastiques solides, en métal, et des morceaux de fer. Les alentours des décharges sont devenus un centre d’affaires et chacun trouve son compte. La promptitude dans la collecte est de mise. Il faut être matinal pour que la moisson soit importante. Très tôt le matin, hommes, femmes et enfants sont positionnés et attendent impatiemment leurs principaux fournisseurs. Dès qu’ils aperçoivent les camions, c’est la course au ramassage. Fouiller et prendre les objets les plus précieux, tel est le quotidien de braves hommes, femmes et enfants œuvrant inlassablement aux alentours des décharges. Ils savent que chaque objet a de la valeur et, est utile pour d’autres personnes.  Les objets sont triés et classés par catégories. Certes, c’est un travail harassant, mais qui génère des ressources.

Mahamadou Namata a choisi ce travail compte tenu des difficultés d’accéder à certains emplois, dit-il. Il a interrompu sa scolarité en classe de 4e au CEG 35 de Niamey pour des raisons personnelles.  Il a débuté ce métier depuis plus de cinq ans. Ce qui lui a permis de se marier et organiser tout récemment le mariage de son enfant. Il vit actuellement à Niamey avec sa famille. Mahamadou achète entre autres des bouteilles et des bidons en plastique ainsi que des morceaux de fer usés et des métaux. Concernant les bidons, il achète la bouteille de 0,5 litres à 5 FCFA. Après l’avoir nettoyée, il la revend à 10 FCFA afin d’engranger un bénéfice de 5 FCFA sur chaque bidon. Assis devant un lot de bidons bien lavés, il a confié que ce lot peut coûter environ 10.000FCFA représentant une partie de la traite journalière.  Pour les bouteilles en verre, elles se vendent à 50FCFA, 100F CFA, et 150 FCA selon la qualité et la dimension. Ce sont des bouteilles de bière et de vin. Les bouteilles en verre sont exportées vers les pays côtiers, tandis que les bouteilles en plastique sont revendues sur place. Le jeune père s’est dit  fier de ce travail après avoir montré l’envoi qu’il vient d’effectuer dans son village natal à destination de ses parents. M. Mahamadou a noté avoir souvent enregistré des chiffres d’affaires de plus de 15.000FCFA par jour. Cela dépend également des divers paramètres conditionnés par les circonstances. Pour ce qui est des conditions de travail au regard des risques qu’ils encourent, il a confié avoir été sensibilisé par les agents de la municipalité. Ce qui explique qu’ils sont protégés en portant des gangs et de bottes afin d’être à l’abri des maladies liées à l’assainissement et l’hygiène. Certes, ils ont ralenti les activités pendant la période de pic de la pandémie de la COVID-19, mais ils ont repris du fait qu’il s’agit de leur survie. Il a rassuré que depuis qu’il a entrepris cette activité il n’a jamais été victime d’une quelconque maladie. Il a par ailleurs montré la marmite dans laquelle, ils préparent à manger sur leur lieu de travail. M. Mahamadou Namata a souligné être solidaire avec tous ceux avec qui ils travaillent. A l’heure du déjeuner, ils se retrouvent en groupe pour manger. Ce qui traduit l’esprit de solidarité existant entre eux.

Pour sa part,  M. Zabeirou Abdou,  a indiqué également exercé ce travail depuis des années. C’est grâce à ce métier qu’il a satisfait les besoins de sa famille. Il est à pied d’œuvre pour  se protéger de toutes les maladies en portant des gangs et des bottes. Il a clamé être fier de ce travail avant de confier qu’il travaille avec des étudiants qui sont à l’Université. « Nous travaillons avec deux étudiants de l’Université dont l’un à même un taxi. Ils partent à l’Université en dehors des heures du travail ». Parlant de ses affaires, il a noté qu’il achète auprès des ramasseurs de bouteilles, de bidons, de morceaux de fer. Il a expliqué que  le kilogramme de fer s’achète à 125 FCFA afin d’être revendu à 135 FCFA aux grossistes qui exportent vers le Nigéria, le Ghana, le Togo, et le Bénin. Pour ce qui est des métaux, une partie est vendue aux forgerons pour la confection des marmites et autres ustensiles telles que les louches, les cuillères, etc. Il s’est réjoui de ce qu’il est en train de faire et estime avoir pris  des dispositions pour se protéger des éventuels risques. Il a souligné qu’ils sont issus de divers horizons du pays et chacun  s’en sort tant bien que mal.

Quant à Elhadj Mahamadou il excelle dans l’achat et la vente des objets usés depuis des années. Il s’approvisionne auprès des ramasseurs de bouteilles, de boites de canettes, de bidons de 0,5 litres, de morceaux de fer, etc. Selon lui, les plastiques solides sont d’abord concassés, puis  broyés au niveau d’une usine qui est installée non loin des décharges avant d’être mis en sac, et ensuite exporter vers le Ghana. Les morceaux de fer sont transportés vers le Bénin, le Nigéria, et le Togo. Concernant les bouteilles de 0,5 litres, elles sont exportées à Kantchari à la frontière avec le Burkina, et une partie est écoulée sur place. Le kilogramme de fer se vend à 125 FCFA. Les ramasseurs prennent leur temps pour concasser. C’est un travail qui demande de la patience et de la persévérance.

Des mères de familles et des enfants excellent dans ce travail. C’est le cas du jeune Moussa qui profite des grandes vacances pour collecter et revendre des objets. Il explique  qu’il procède d’abord à la collecte des objets pendant deux semaines avant de les revendre. Il gagne environ 30.000 FCFA en deux semaines de collecte. D’une dizaine d’années, cet enfant résident au quartier Koubia, assiste ses parents à travers ce travail. 

Si certains s’installent autour des décharges et attendent les camionneurs, d’autres passent de porte à porte pour vérifier et collecter tout ce qui est utilisable pour la prospérité de leurs affaires.

Par Laouali Souleymane(onep)

24 septembre 2021
Source : http://www.lesahel.org/