Niamey étouffe : la ceinture verte en sursis, un patrimoine écologique à sauver
Encerclée par une urbanisation galopante, la capitale nigérienne perd progressivement l’un de ses derniers poumons verts : la ceinture verte de Niamey. Créée dans les années 1960, cette forêt urbaine s’étendant jadis sur plus de 2 300 hectares avait pour vocation de protéger la ville des tempêtes de sable, réguler le microclimat, et offrir aux habitants un espace de fraîcheur et de loisirs. Aujourd’hui, elle ne tient plus qu’à un fil, rongée par les ambitions foncières, la pression démographique, et l’inaction politique.
L’urbanisation anarchique : premier fossoyeur du projet
Depuis le début des années 2000, la ceinture verte subit une fragmentation accélérée. Des milliers de parcelles ont été illégalement ou arbitrairement distribuées pour satisfaire des demandes pressantes en logements ou en compensation d’arriérés salariaux. En à peine deux décennies, la superficie boisée a fondu de moitié, passant de 2 331 hectares à environ 1 300 hectares. Les bulldozers ont remplacé les pelles de reboisement, et les arbres cèdent la place aux murs de ciment.
Une décharge à ciel ouvert
Le déclin de la ceinture verte ne se limite pas à l’invasion foncière. Elle est aujourd’hui transformée en décharge sauvage, souillée par les ordures ménagères, les eaux usées et les dépôts illégaux de matériaux de construction. Cette pollution met en péril la biodiversité encore présente et fait courir de graves risques sanitaires aux riverains. Ce qui était censé être un sanctuaire vert est désormais un foyer de dégradation environnementale et sociale.
Un projet à l’abandon malgré les promesses
Malgré les initiatives ponctuelles – comme le décret de 2004 pour la protection des espaces verts ou le plan d’action adopté en 2020 –, l’absence de volonté politique ferme, la faiblesse des moyens et le manque de coordination entre les institutions compromettent tout effort de sauvetage. Les opérations de reboisement, bien que symboliques, restent insuffisantes face à l’ampleur des destructions.
Un effondrement silencieux, aux conséquences durables
La disparition progressive de la ceinture verte n’est pas une simple perte paysagère : elle affecte directement la qualité de vie des Niameyens. Moins de couverture végétale signifie davantage de chaleur urbaine, une mauvaise qualité de l’air, et une vulnérabilité accrue face aux inondations et aux tempêtes de sable. Les effets du changement climatique viennent amplifier ce désastre écologique, menaçant durablement l’équilibre de la capitale.
L'urgence d’un sursaut citoyen et institutionnel
La sauvegarde de la ceinture verte ne peut se faire sans une mobilisation collective. Il est impératif de rétablir son statut de zone protégée, de sanctionner les occupations illégales, et d’impliquer les populations locales dans sa gestion durable. Les politiques d’aménagement urbain doivent intégrer pleinement la préservation des espaces verts comme un levier fondamental de résilience face aux dérèglements climatiques.
Restaurer pour survivre
La ceinture verte de Niamey est bien plus qu’un espace arboré : elle incarne un patrimoine écologique, un régulateur climatique et un refuge vital pour les citadins. Son effondrement ne relève pas d’une fatalité, mais d’un choix collectif. Choisir de l’ignorer, c’est condamner Niamey à suffoquer. La restaurer, c’est offrir à la capitale une chance de respirer, aujourd’hui et pour les générations à venir.
Boubacar Guédé (Nigerdiaspora)