Du sous-sol à l’usine : comment les bassins miniers peuvent transformer l’économie du Niger
Uranium, or, pétrole ... : sans transformation locale, ces rentes nous échappent. L’heure est à une stratégie de « bassins miniers » intégrés, capables d’alimenter nos usines en matières et semi-finis, et d’installer durablement la puissance nigérienne.
C’est Allah qui a lui-même dessiné nos « bassins miniers »
Si l’on s’en tient au répertoire de gisements et indices miniers connus à la date de 1983, la carte des gites minéraux du Niger qui en résulte esquisse sommairement sept grands bassins miniers qui sont :
1. La rive-droite du fleuve d’Ayorou à Gaya ;
2. L’Ader-Doutchi ;
3. Le Tin Mersoi ;
4. L’Aïr-Proche Ténéré ;
5. Le Djado ;
6. La bande Termit-Dibella-Homodji et Tchéni-Tchadi ;
7. Le Damagaram-Mounio et le sud-Maradi.
Le sud du Bassin des Ouilliminden, notamment la zone couverte par les départements de Tahoua, Bagaroua, Abala, Banibangou, Ouallam, Filingué, Balleyara, Loga, Bini Ngaouré, Dosso, Falmey, Doutchi, Tibiri, Dioundiou et Gaya qui n’a pas encore été prospectée, pourrait révéler deux ou trois autres « bassins miniers » structurés autour du charbon, du fer, du calcaire, de la bauxite et de la kaolinite dont les indices sont connus. Tout cela s’allie au potentiel agricole fait d’eaux fossiles inépuisables, d’un fleuve qui débite 40 milliards de mètres cubes par an et des dallols Bosso et Maouri qui livrent l’eau à deux mètres.
Ce sont des bassins miniers naturellement formés, chacun avec un potentiel qui lui permet de s’affermir, se distinguer et s’intégrer aux autres pour un épanouissement national dans le concert des nations industrialisées.
Aussi, le message que je voudrais porter aux décideurs est celui d’une perspective d’industrialisation du pays par une stratégie de « bassins miniers » reçus d’Allah, dans l’optique d’une intégration des chaines de valeur de leurs ressources, tout en s’alimentant les uns les autres de matières premières et/ou de produits semi-finis.
Il faut donc croire que chacun des bassins miniers ci-dessus cités contient assez de potentiel pour transformer le pays. Et si la valorisation minière est doublée d’une grande agriculture d’irrigation ainsi que toutes les régions en ont le potentiel, c’est entre sept et dix pôles miniers, industriels et agroindustriels de rang mondial qui vont émerger.
L’Europe du 19ème siècle s’est industrialisée non par des industries isolées les unes des autres, mais par des bassins miniers dont les plus célèbres sont la Ruhr en Allemagne et l’Alsace-Loraine en France, forgés sur des gisements médiocres de charbon et de fer. Même le petit Luxembourg en mouchoir de poche, s’est donné un bassin minier avec du fer qu’il possède et du charbon qu’il importe.
Le fer, le charbon et le phosphate ont individuellement enrichi beaucoup de pays à travers leurs chaines de valeur. Le Niger possède toutes ces ressources, ensemble dans l’Ader-Doutchi et dans d’autres régions. Au demeurant, Allah a montré que le fer est le facteur de la puissance et de la richesse des nations à travers ce glorieux verset : «…Et Nous avons fait descendre le fer, dans lequel il y a une force redoutable, aussi bien que des utilités pour les gens…» Sourate 57 : AL-HADID, verset 25.
Cessons donc de travailler sur des ressources minières isolées les unes des autres pour enfin penser en « BASSINS MINIERS » structurants les uns pour les autres, pour produire partout au Niger des biens industriels finis.
A toutes fins utiles :
- L’uranium restera une industrie enclave au Niger, c’est-à-dire une activité sans chaine de valeur, et ce pendant encore des décennies, le temps que le pays ait les capacités technologiques nécessaires à sa transformation en énergie ;
- L’or a comme chaine de valeur le secteur pointu des circuits électroniques pour ordinateurs, téléphones et satellites. Ce n’est pas demain que le Niger en imprimera.
Or, aucune ressource naturelle sans chaine de valeur locale ne peut être réellement profitable à un pays, soit-elle de l’uranium, de l’or et du pétrole, surtout quand on n’en perçoit que 15 à 20% des parts.
Et en persistant à ne travailler que ces ressources « phares » du système capitaliste trompeur et spoliateur des peuples, nous perpétuons avec acharnement un modèle qui nous appauvrit depuis plus de cinq décennies. Sortons-en !
Le Niger est un pays exceptionnel. C’est la réflexion stratégique qui lui fait défaut.
Ali ZADA
Expert en politiques publiques ;
Enseignant à Swiss Umef University de Niamey.