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Niger : la fourrière de Niamey confiée à une société privée, entre opportunités et soupçons

niger la fourriere de niamey 2Fourrière municipale : N-TRANS, un autre scandale
Peu de Nigériens la connaissent encore. Pourtant, cette société privée, dénommée N-TRANS dont les pièces constitutives ont été déposées au Greffe et immatriculée au registre du commerce et du crédit immobilier sous le numéro NE-NIM- 01-2024-B17-00007 le 2 août 2024, est une entreprise au succès tracé dans le marbre du pouvoir de l’État. Sous des airs anonymes et la couverture douillette que lui offre la ville de Niamey, cette société dont l’objet est constitué, entre autres, du transport des personnes et de marchandises, l’aménagement et la mise en circulation de véhicules destinés au transport, le transport de toute nature, va bientôt capter l’argent public comme des flocons de neige en plein hiver russe. Une pratique digne de la Renaissance. C’est à cette société privée qu’échoit désormais la mission de réprimer les véhicules en stationnement anarchique dans la ville de Niamey. Une mission pour laquelle la ville de Niamey a mis les petits plats dans les grands en se dotant d’une fourrière municipale avec tout ce que cela comporte comme matériels et engins nécessaires. Pour faire bonne mesure, la ville de Niamey a ouvert dans ses locaux un guichet de paiement des quittances liées à la mise en fourrière. C’est un changement de paradigme qui doit générer beaucoup de ressources financières et cela attise des convoitises dans un Niger où l’Etat est devenu la vache laitière de groupes organisés. N-TRANS ? Une démarche cachotière qui en dit long sur le fond du projet Récemment sur le site de la nouvelle fourrière municipale où seront acheminés les véhicules pris en infraction et non enlevés par le propriétaire dans un délai de trois jours, l’administrateur délégué de la ville de Niamey, le colonel Boubacar Soumana Garanké, a expliqué que la création de la fourrière est « une réponse adaptée à ce problème qui gangrène notre capitale ». Pour récupérer son véhicule, il faut appeler une ligne dite verte, le numéro 22. C’est en ce moment seulement que vous obtenez les informations sur la procédure à suivre pour récupérer votre véhicule. Une démarche qui jure d’avec les principes de transparence et la mise à disposition de toutes informations susceptibles d’alerter les usagers de la route sur ce qui les attend. Sur le site « désormais dédié au placement des véhicules abandonnés sur la voie publique ou faisant l’objet d’une saisie pour infraction au Code de la route qui fonctionnera sept jours sur sept, de 9h à 19h », l’administrateur délégué de la ville de Niamey a rappelé les principales infractions pouvant conduire à la mise en fourrière d’un véhicule. Il a cité pêle-mêle les stationnements gênants, notamment en double file ; les arrêts ou stationnements dangereux, gênants ou abusifs ; le non-respect de certaines règles de circulation ; les abandons de véhicules dans un lieu public ou privé ainsi que la présence d’un véhicule hors d’usage (épave).

N-TRANS est visiblement cisaillée sur le modèle de Haroun Printing

Sur place, sur le site de la fourrière, on voit des engins divers du personnel appartenant à la ville de Niamey, notamment la police municipale qui est d’ailleurs déployée dans la ville pour traquer les contrevenants. Rien de moins pour donner un cachet étatique au projet. Pourtant, derrière cette alchimie où l’État est mis en avant et ses intérêts manifestes, se cache un contrat des plus rocambolesques. C’est à N-TRANS d’un certain Moussa Touré Souleymane que la ville de Niamey a concédé la gestion de cette fourrière municipale. Ni l’administrateur délégué ni le responsable de la fourrière lors du passage de ce dernier, le lundi 11 août 2025, n’a daigné informé les Nigériens sur cette cession d’un de ses portefeuilles les plus rentables à un privé. Bien évidemment, beaucoup de supputations ont cours sur l’identité du patron de N-TRANS ainsi que ses rapports avec les premiers responsables de la ville de Niamey. N-TRANS est visiblement cisaillée sur le modèle de Haroun Printing, cette société privée spécialisée dans la confection de permis de conduire biométriques dont les promoteurs, des caïds de la 7e République, ont usé des moyens et des attributs de l’État pour se remplir les comptes bancaires de milliards. Autant dire une autre bulle financière pour l’État qui n’engrange, en fin de compte, que le bénéfice d’une propagande publicitaire et la désaffection de citoyens vis-à-vis de la chose publique. Une grosse bulle financière pour l’État qui, comme dans le cas de Haroun Printing, va gruger l’État, la ville de Niamey n’ayant à ce jour rendu public le fameux contrat qui le lie à cette société.

N-TRANS a donc de quoi tenir et, à moins d’un cataclysme, ses promoteurs, visibles et cachés, peuvent se frotter les mains

Située dans la zone industrielle de Niamey, N-TRANS a peutêtre de beaux jours devant elle. Avec la police municipale à sa disposition et la couverture bien épaisse de l’autorité municipale qui y accorde le plus grand intérêt, la société a d’autant plus la baraka que Haroun Printing dont elle est une copie conforme n’a jamais cessé d’exister. Elle a bien survécu aux évènements du 26 juillet 2023 et continue son tranquille et fructueux parcours. Si elle est délocalisée des lieux connus auparavant, Haroun Printing est toujours là, logé sur le site de la visite technique pour les véhicules (ancien CFTTR). N-TRANS a donc de quoi tenir et à moins d’un cataclysme, ses promoteurs, visibles et cachés, peuvent se frotter les mains. Les termes du contrat, notamment dans ses aspects de partage de recettes entre les parties (N-TRANS et ville de Niamey) n’étant pas connus, on est en face d’une véritable nébuleuse.

Affaire à suivre.

Laboukoye (Le Courrier)