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Article 12 de la Charte de la Refondation : La question des langues nationales toujours d’actualité

communique du conseil des ministres du vendredi 16 mai 2025Le Conseil des ministres du 16 mai 2025 a, au titre de la Réorganisation des ministères, adopté plusieurs projets de décret parmi lesquels le projet de décret portant organisation du Ministère de l’éducation nationale, de l’alphabétisation et de la promotion des langues. Ce qui a frappé, de prime abord, les observateurs avisés, c’est que la dénomination ‘’Ministère de l’éducation nationale, de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales’’ oû Dr Elisabeth Sherif a été reconduite, a été modifiée à l’issue du Conseil des ministres du 16 mai : le caractère national des langues tombe carrément. Ce n’est plus promotion des langues nationales, mais promotion des langues tout court. Cette déchéance de nationalité des langues nigériennes continue de susciter beaucoup d’interrogations au sein de l’opinion. Car, les nigériens ne savent pas exactement ce que renferme le fameux décret qui vient d’être adopté en Conseil des ministres. Il est vrai que le ministère doit être réorganisé et son organigramme connu jusqu’ici doit changer, puisqu’il a été amputé de l’enseignement professionnel, comme l’ont réclamé,du reste, des acteurs du sous-secteur qui pensaient à juste titre que l’enseignement professionnel et technique mérite à lui seul d’être érigé en portefeuille ministériel.C’est fait, et il revient au Pr Farmo Moumouni. Mais, la réorganisation a tout l’air de porter sur le statut des langues des différentes communautés nigériennes, consacrées jusqu’ici dans les différentes constitutions langues nationales. Les langues nigériennes garderont-elles, toutes, leur nationalité pour retrouver leur ancien statut ? Ou bien s’inscrira-t-il dans le sens de l’article 12 de la Charte de la Refondation? Telles sont les questions que les nigériens se posent depuis la publication du communiqué du Conseil des ministres du 16 mai 2025. Bien de nigériens, issus de toutes les communautés nationales dont les langues ont été déchues de leur nationalité, espèrent que les autorités du pays ont entendu et pris en compte les observations faites sur l’article 12 de la Charte et le tollé général qu’il a soulevé. Et, que de ce fait, elles reviendront sur ce fameux article 12 pour le réécrire afin que toutes les langues nigériennes retrouvent effectivement leur nationalité. Mais, selon toute vraisemblance, par respect pour la hiérarchie des normes, le décret ne se mettra pas en porte à faux avec la Charte de la Refondation qui a valeur constitutionnelle. Celle-ci joue, aujourd’hui, le rôle de Constitution. Et c’est au décret de se s’y conformer. Pas l’inverse. Le débat sur la question est donc loin d’être clos au sein de l’opinion.

Car, depuis la promulgation de la Charte de la Refondation par Décret n°2025-160/P/CNSP du 25 mars 2025, des propos des plus désobligeants, d’un autre âge, ont été tenus de part et d’autre. Et ça n’a pas l’air de s’arrêter. On ne reconnait plus le nigérien, dans l’ensemble si pondéré et respectueux de l’autre et de l’ordre public. Les voix se sont élevées qui pour dénoncer une exclusion, qui pour défendre cette disposition. Rappelons que l’article 12 de la Charte de Refondation dispose que ‘’Les langues parlées du Niger sont l’Arabe, le Buduma, le Fulfuldé, le Gurmancema, le Hausa, le Kanuri, le Tagdalt, le Tamajaq, le Tassawaq, le Tubu et le Zarma-Sonraî’’. Il poursuit en son alinéa 2 que : ‘’La langue nationale est le Hausa’’. Et c’est justement cet alinéa 2 qui a suscité la polémique qui ne fait que s’enfler, du fait de l’incompréhension qui l’entoure. Parce que les textes législatifs ont des conséquences sur la vie des citoyens puisqu’ils prescrivent des comportements attendus et des écarts ou violations à sanctionner. Alors, quelles sont les conséquences de cette disposition dans la vie réelle des nigériens ? En attendant les réponses aux interrogations légitimes des nigériens, surtout ceux qui estiment que leurs langues ont été dégradées, leur nationalité mise en doute, les nigériens parlent, et des fois sans tourner sept fois la langue dans la bouche comme la tradition le recommande, avec des insultes grossières, et des propos grivois qui entament l’unité nationale et la cohésion sociale prônées, recherchées et cultivées jalousement par les nigériens, leurs autorités en tête. C’est pourquoi il y a nécessité de revenir à la sérénité. Il faut arrêter cette descente dans les égouts pour que, tous les nigériens, unis comme auparavant, puissent, dans la cohésion et la fraternité, s’aligner derrière les autorités, le CNSP et le gouvernement, pour amener le Niger sur les rives glorieuses de la souveraineté. Le Niger n’a pas besoin d’être détourné de son combat pour l’indépendance véritable et la justice.

Bisso (Le Courrier)