Crise migratoire au Sahel : 125 Ivoiriens expulsés d’Algérie rapatriés depuis le Niger dans le cadre d’un retour encadré
Confrontée à une crise migratoire régionale amplifiée par les expulsions massives orchestrées par l’Algérie, la Côte d’Ivoire, en collaboration avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), a procédé au rapatriement de 125 de ses ressortissants contraints de quitter l’Algérie pour le Niger. Cette opération s’inscrit dans un vaste programme régional de retours volontaires assistés, mis en place pour protéger des milliers de migrants vulnérables abandonnés aux portes du Sahara.
Des expulsions massives vers le Niger
Depuis 2024, l’Algérie a durci sa politique de refoulement des migrants subsahariens. Rien qu’au premier semestre 2025, plus de 16 000 personnes, principalement originaires d’Afrique de l’Ouest, ont été expulsées et abandonnées au « Point Zéro », à la frontière nigérienne, dans des conditions humanitaires extrêmes : absence de nourriture, d’eau et risque accru de violences et de séparations familiales.
Un retour volontaire coordonné et sécurisé
Face à cette urgence humanitaire, la Côte d’Ivoire a mobilisé, via la Direction générale des Ivoiriens de l’extérieur et avec l’appui logistique de l’OIM, une opération de retour volontaire permettant à 119 hommes, cinq femmes et un nourrisson de regagner Abidjan le 18 juin 2025 à bord d’un vol spécialement affrété. Après des contrôles sécuritaires à l’aéroport Félix Houphouët-Boigny, ils ont été pris en charge et transférés vers la cité universitaire de Port-Bouët, aménagée pour offrir un hébergement provisoire, un suivi médical et un accompagnement psychosocial.
Un accompagnement pour une réinsertion durable
Au-delà du simple retour, les autorités ivoiriennes ont mis en place un dispositif structuré pour favoriser la réinsertion socio-économique de ces citoyens vulnérables. Chaque rapatrié bénéficie ainsi :
- d’un soutien psychosocial pour surmonter les traumatismes liés au parcours migratoire et aux conditions d’expulsion ;
- d’un pécule de retour pour rejoindre sa famille dans sa région d’origine ;
- de programmes de formation professionnelle et de microfinancement de projets pour assurer une autonomie financière pérenne.
Cet engagement traduit la volonté du gouvernement ivoirien de transformer la crise migratoire en une opportunité de réintégration et de valorisation du potentiel humain au service du développement national.
Le Niger, carrefour migratoire sous pression
Situé au carrefour du Maghreb et de l’Afrique subsaharienne, le Niger occupe une place centrale dans la gestion des flux migratoires. Les centres de transit humanitaire d’Agadez et d’Assamaka, gérés par l’OIM, accueillent chaque mois des milliers de migrants refoulés d’Algérie et de Libye. Pour désengorger ces infrastructures et répondre aux besoins urgents, des opérations de retour volontaire, similaires à celle des Ivoiriens, sont régulièrement organisées pour d’autres nationalités : Maliens, Guinéens, Sierra-Léonais, Camerounais, Sénégalais et Burkinabè bénéficient également d’un accompagnement humanitaire et financier pour rejoindre leur pays d’origine.
Une démarche qui inspire la région
À ce jour, la Côte d'Ivoire n’est plus la seule à avoir pris l’initiative de rapatrier ses ressortissants depuis le Niger. Des pays comme la Sierra Leone, le Mali et le Burkina Faso ont déjà mis en place des dispositifs analogues, dans le cadre d’un effort régional coordonné par l’OIM et soutenu par des partenaires internationaux. Cette approche collective vise à alléger la pression sur les infrastructures nigériennes et à garantir une réinsertion digne et durable des migrants rapatriés.
Une approche régionale à consolider
Cette dynamique de retour volontaire assisté, appuyée par l’Union européenne et les gouvernements nationaux, contribue à atténuer les effets des expulsions massives tout en offrant aux migrants une nouvelle chance dans leur pays d’origine. Toutefois, pour de nombreux observateurs, cette stratégie reste fragile face à la persistance des expulsions et à l’ampleur des flux migratoires vers le Maghreb et l’Europe.
Boubacar Guédé (Nigerdiaspora)