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Niger - Reddition des comptes publics : une remise en cause de certains actes sans désignation des responsables !

Justice niger 02A maintes reprises, dans ces mêmes colonnes, nous n’avions sans cesse évoqué la question impérieuse de la reddition des comptes publics à laquelle les citoyens accordent une importance particulière depuis de nombreuses années. C’est une grande aspiration populaire qui est apparue à une certaine époque de l’Histoire politique nigérienne marquée par l’avènement au pouvoir d’un personnage politique qui avait, auparavant, vendu le concept de la bonne gouvernance au peuple nigérien, il est bien vrai sous une étiquette trompeuse de ‘’Programme de la renaissance du Niger’’, en dénonçant, régulièrement, au cours de la décennie 2000, sous la Cinquième République du tandem Tandja/Hama (Paix à leur âme !), les soi-disant travers de gestion publique qu’il raillait en les qualifiant de ‘’Zakayeries’’, du nom de cet opérateur économique originaire d’Ouallam, proche du régime politique de l’époque, qu’il pourfendait pour les marchés publics que cet opérateur économique décrochait. Mais, cela n’avait guère empêché à Issoufou Mahamadou d’accueillir dans son parti Zakou Djibo (Paix à son âme !), au cours de son second et dernier mandat ! Quelle inconséquence politique, mieux, quelle imposture politique de la part d’Issoufou Mahamadou ! C’était donc un personnage qui se revendiquait du label de bonne gouvernance, qui écumait les sentiers nigériens pour prêcher la bonne parole de son ‘’évangile’’, qui fut porté au pouvoir suprême, au printemps 2011, à l’issue d’un processus électoral pas tout à fait irréprochable ! Issoufou Mahamadou : de ‘’Lhomme de la bonne gouvernance’’ à l’’’homme des affaires’’ Mais, une fois installé au pouvoir, les Nigériens s’attendaient à voir un Président de la république volontariste, désintéressé et profondément patriote à l’oeuvre, mais ce fut plus un chef de bande, d’une mafia, qui avait installé un système bien huilé de prédations de ressources par diverses méthodes, des marchés publics classiques en passant les PPP (Partenariat/ Public/Privé) et autres prises de participations dans le capital de certaines entités économiques lucratives. Ainsi, durant plus d’une décennie, les finances publiques et les ressources naturelles du pays ont subi les assauts répétés de la camarilla nichée dans les hautes sphères décisionnelles de l’Etat, mettant l’économie nationale exsangue et sous coupe réglée. Partout où l’on pouvait sentir un peu d’odeur de l’argent, la mafia rose était à l’affût pour l’accaparer. Du coup, aujourd’hui, si vous vous hasardiez à poser la question à ‘’Monsieur Google’’ qui est ‘’l’homme le plus riche au Niger’’, il vous en sortirait deux noms : Issoufou Mahamadou et Baba Ahmed, le PDG du Groupe ORIBA ! Pour le second, cela se comprend, puisque c’est un opérateur auquel les affaires ont souri ; mais, pour le premier, un ancien Chef d’Etat, l’étiquette en est un peu insultante à cette haute fonction présidentielle, une fonction contraire à l’accumulation de la richesse primitive. A moins que l’on ne s’appelle Donald Trump, l’actuel président des USA, qui n’a pas peur du conflit d’intérêts en faisant récemment la promotion de son empire immobilier dans le Golfe en sa qualité de président des Etats- Unis d’Amérique ! Mais, rassurezvous, une fois en dehors des murs de la ‘’White House’’ (Maison Blanche), il pourrait être rattrapé par tout cela.

Cependant, malgré l’affairisme débridé qu’il avait installé au sommet de l’Etat et qui lui avait permis d’amasser une fortune considérable qui lui a valu une mention dans ce moteur de recherches de Microsoft, Issoufou Mahamadou n’a jamais été inquiété pour cela. Mais, ce qui l’est moins, ce sont certains de ses actes passés qui font, aujourd’hui, l’objet de quelques remises en question de la part du régime du Cnsp.

Redresser sans juger les auteurs des actes incriminés : une technique ‘’Made by Cnsp’’ L’on l’aura constaté, ces derniers temps, à défaut de pouvoir traduire Issoufou Mahamadou devant la justice, comme ne cessaient ou ne cessent toujours de le réclamer, le régime du Cnsp a entrepris une démarche surprenante consistant à détricoter certains actes posés par le régime d’Issoufou Mahamadou. Aujourd’hui, en engageant un brasde- fer les Chinois (CNPC, WAPCO/ NIGER, SORAZ, Hôtel SOLUX de Niamey), le Cnsp entend seulement redresser des torts causés à l’Etat du Niger du fait de la complaisance, voire parfois de la complicité du régime de la renaissance d’Issoufou Mahamadou qui avait fermé les yeux sur ces mauvaises pratiques chinoises. Sans inquiéter Issoufou Mahamadou à l’origine de tout ce bordel observé dans la filière pétrolière, le Cnsp serait contenté d’en corriger les fautes en remettant en cause bon nombre de privilèges que les sociétés chinoises s’octroyaient indûment avec le bienveillance ou la complicité du régime de la renaissance. Actualité oblige, lors de son entretien sur la RTN, en date du 31 mai 2025, le Président de la république Abdourahamane Tiani a particulièrement chargé la coopération chinoise qu’il a comparée à celle française.

Il en est de même du dossier de SUMMA récemment assignée en référé par l’Etat du Niger au sujet du non-respect de certaines clauses contractuelles, référé remporté d’ailleurs par la partie nigérienne. Ainsi, beaucoup de choses sont en train d’être revues dans ce PPP qui sentait, sur toute la ligne, le bon ‘’Haraka’’ (Affaire) entre ce consortium turc et la mafia rose passée. On parle même de la durée de ce PPP (30 ans), trop pour un contrat dont le coût global avait été estimé à 101 milliards de nos francs.

Auparavant, il avait été décidé de mener un audit externe au niveau de la SORAZ, et même l’avis d’appel d’offres pour le choix du cabinet avait été lancé au cours d’un Conseil des Ministres en date du 04 janvier 2025. Le Cnsp, pour tenter de sauver la face comme on dit souvent, pour sauver les meubles de l’impératif de la reddition des comptes publics, n’aura eu d’autre choix que de procéder à ce que l’on appelle couramment : diviser la poire en deux. C’est une solution médiane où chacune des parties en discussions renonce à quelques exigences de départ. Mais, plus globalement, c’est l’une des incarnations de l’indécision chez une personne dépositaire d’une quelconque autorité ou légitimité pour trancher une question ou pour prendre une décision. C’est un jeu d’équilibrisme, il faut bien le comprendre comme tel, afin de montrer que tout ce qui est relatif au régime passé peut être ‘’démontable’’, mais ce serait seulement au préjudice d’éventuelles poursuites pénales comme il en est dans toutes procédures relatives à la reddition des comptes publics. Ainsi, c’est sur le terrain du droit pur des affaires ou du Code de travail nigérien que le Cnsp compte régler les comptes au régime déchu, des procédures contentieuses généralement exclusives de la procédure pénale classique. Le Cnsp semble avoir fait son choix, qui consisterait à redresser ce qui pourrait l’être, sans chercher à toucher à la responsabilité directe des auteurs de ces actes frauduleux, indélicats commis par les princes régnants de la renaissance.

A présent, la seule question qui vaille d’être posée dans cette demi-mesure à l’égard de la gestion publique antérieure pourrait celle de savoir si cette ‘’solution négociée’’ serait de nature à satisfaire la grande aspiration populaire à la reddition des comptes publics telle que toujours exprimée par l’écrasante majorité des citoyens nigériens. Pas si sûr que ce ‘’colmatage’’ ferait véritablement les affaires du Cnsp auprès de l’opinion publique.

Ali Koma (Le Canard en furie)