Refonder l’économie du Niger : s’inspirer du modèle chinois
Alors que l’Afrique affirme sa souveraineté et son cap, la Chine exhibe un modèle d’État stratège où entreprises publiques et privées tirent ensemble la croissance sans renier leurs valeurs. Pour l’Afrique, et le Niger en pleine refondation, l’urgence est de clarifier le cap économique et de saisir une coopération d’égal à égal qui apporte capital, technologies et ingénieurs, plutôt qu’un simple changement d’allié.
Le modèle économique chinois serait très intéressant à étudier dans nos écoles d’économie. Il voit une élite communiste et tout l’appareillage politique de superstructure s’aligner parfaitement pour promouvoir une économie puissante et aux fondations solides, dans laquelle des entreprises publiques gigantesques et des centaines de milliers d’entreprises privées, portent sous le sceau du modernisme, les valeurs d’une civilisation pertinemment industrieuse et éminemment commerçante. Le modèle montre une économie fermée, s’ouvrir à des capitaux étrangers pour acquérir du savoir-faire et pénétrer les marchés « ennemis », sans s’aliéner et sans renoncer à ses principes et valeurs. C’est assurément cette symbiose culturelle, idéologique, politique et technique du point de vue de la qualité des politiques publiques et de la finesse diplomatique, qui fait de la Chine une puissance productrice, compétitive, novatrice et toujours triomphante dans les défis qu’elle se lance pour rattraper l’occident.
Et que faisons-nous en Afrique, pendant ce temps ?
Nous nous montrons incapables de poser notre retard économique et technologique en termes de « modèle de développement économique ». Quand nos économistes parlent, ils ne savent même pas à quel modèle économique ils se réfèrent. Et c’est là toute notre tragédie. Peut-on dans ces conditions s’attendre à des voies de réforme de leur part ?
Nous amorcerons le développement quand les décideurs et les économistes s’accorderont enfin sur le fait que le développement économique résultera d’un changement de paradigme, notamment du rôle de l’Etat dans le processus. Au Niger notre refondation aurait pu être simplement une refondation du modèle économique avant tout autre débat politique. Car en vérité c’est d’elle que partirait la prospérité, la stabilité politique, les capacités nationales de défense et tout le reste.
L’ère de domination et de prédation de l’occident sur l’humanité est en train de se clore. C’est un processus irréversible. Le soleil de la Chine se lève à nouveau sur l’humanité, avec de nouvelles valeurs desquelles sont exclues les intimidations, les menaces, les sanctions et les guerres d’agressions. Dans cette nouvelle ère, notre place se mesurera à la hauteur de nos ambitions.
La Chine s’offre en modèle aux nations africaines. Et bien plus, elle s’ouvre aux perspectives de coopération économique avec les modèles d’affaires que nous lui proposerons, car dans la culture chinoise des affaires on ne sait pas dire « Non ».
Les pays qui sauront se mettre dans la géoéconomie chinoise en tireront parti. Ce ne serait pas « changer » de maitre que se plaisent à le propager certains esprits superficiels au regard de la coopération des pays de l’AES avec la Russie. Ce serait un repositionnement géostratégique sur une source libre d’accès, possédant sous un seul toit l’argent, les machines, les technologies et les ingénieurs, et surtout disposée à négocier d’égal à égal.
Ali ZADA
Expert en politiques publiques ;
Enseignant à Swiss Umef University de Niamey.